Faits divers

Musique spectrale

Synthèse, imagerie, Anatomie et chirurgie du son

Métaphore médicale :

  • Ces instruments sont traditionnellement regroupés au sein de 4 grandes familles reconnaissables facilement (cordophones, idiophones, membranophones, et aérophones).
  • Une 5ème famille d'instruments existe depuis un siècle environ, celle des électrophones. Le principe de base est d'utiliser des circuits adaptés pour générer des tensions électriques oscillantes du type,
    Equation
    On utilise ces tensions pour alimenter des électro-aimants capables de faire vibrer à l'identique des membranes de haut-parleurs : on sort clairement du cadre de la musique acoustique au sens mécanique du terme. Il n'est pas nécessaire de détailler ici les principes physiques qui sont à la base des circuits oscillants, il suffit de comprendre que les tensions électriques créées peuvent être manipulées, en laboratoire. Par exemple, elles peuvent être amplifiées globalement, pour atteindre le niveau de puissance requis par la mise en branle de la membrane du haut-parleur ou localement, par filtrage sélectif, pour amplifier certaines fréquences et en atténuer d'autres et ce n'est pas tout car l'électronique ne connaît aucune limite, permettant toutes les manipulations que l'on peut souhaiter et qui peuvent résulter en autant de trafics sonores.

Dans tous les cas, une membrane de haut-parleur fidèle vibre comme le signal électrique qui l'alimente. Il en résulte une onde sonore de pression vibrant à l'identique :

Equation

Bien que cette formule contienne toute l'information relative au son étudié, il est plus commode d'en afficher une représentation graphique imagée. La mode de représentation le plus utilisé est celui du sonagramme (On dit plus rarement sonogramme). Comme l'idée est d'afficher simultanément trois degrés de liberté, le temps écoulé, les fréquences partielles et l'intensité de chacune, il apparaît qu'une représentation à deux dimensions ne peut suffire. On s'en tire généralement en recourant à l'artifice suivant : pour chaque son partiel émis, de fréquence fn, on tire horizontalement un segment de droite de longueur proportionnelle à sa durée et positionné en ordonnée en respectant une échelle linéaire des fréquences. C'est l'épaisseur du trait qui renseigne sur l'intensité de chaque partiel (Certains préfèrent un code des couleurs qui doit être fourni en légende).

Sonagramme piano
Exemple de sonagramme (Michèle Castellengo : Ecoute musicale & Acoustique. Eyrolles)

La figure ci-dessus présente un exemple extrait du DVD-Rom d’accompagnement de l’ouvrage monumental "Écoute musicale et acoustique" de Michèle Castellengo, Éditions Eyrolles, 2015. Y sont représentés les sonagrammes des sons émis par une lame de vibraphone (fa3 = 174.6 Hz) et une corde de harpe (mi3 = 164.8 Hz) successivement frappées puis frottées. Les parties supérieures montrent les profils d'intensité globale sans considération pour les fréquences constitutives tandis que les parties inférieures affichent ces détails, ce sont elles qui constituent les sonagrammes proprement dits. Les fréquences des partiels sont repérables en ordonnée. L'équidistance des traits, dans la figure de droite, signe l'harmonicité forte de la corde de harpe (fn = n f1). Dans la figure de gauche, l'équidistance a disparu, signe que l'harmonicité n'est plus que faible (fn ≠ n f1), ce qui confirme que la lame est inharmonique.

Chirurgie esthétique et synthese du son

 

Le courant spectral est né, essentiellement en France, vers 1970, de la volonté de sortir de l'impasse postsérielle par une toute autre porte que celle choisie par les tenants du postmodernisme. Leur ambition très louable a été de privilégier avant tout la qualité acoustique de la musique. Je ne peux, à ce stade, mieux faire que citer Gérard Grisey lorsqu'il s'est exprimé comme suit (Écrits ou l'invention de la musique spectrale, 2008): "Nous sommes des musiciens et notre modèle, c’est le son non la littérature, le son non les mathématiques, le son non le théâtre, les arts plastiques, la théorie des quanta, la géologie, l’astrologie ou l’acupuncture." Voilà qui est bien dit, reste à en tirer une musique qui tienne la route où le son prend le pas sur la note. [ROMPU][ROMPU][ROMPU][ROMPU][ROMPU][ROMPU][ROMPU][ROMPU][ROMPU]Partiels de Grisey invite à l'écoute inhabituelle des composantes du son.

L’introspection du son dans toutes ses composantes renvoie nécessairement à l’idée de spectre harmonique, d’où l’appellation de ce courant. Au niveau de l’instrumentation, la musique spectrale peut recourir à des sources sonores aussi bien électroniques qu’acoustiques. Les courants de l’espace (1979) de Tristan Murail est ainsi une œuvre créée pour ondes Martenot traitées par synthétiseur et petit orchestre. Les précurseurs de la musique spectrale sont le compositeur Edgard Varèse, pour qui la note et le timbre sont indissociables, Olivier Messiaen pour qui la notion de « couleur du timbre » était essentielle, Giacinto Scelsi[5], Horatiu Radulescu et György Ligeti. Dans les années 1970, quelques compositeurs ont contribué à développer ce mouvement en France, dont Roger Tessier[6], Tristan Murail[7], Gérard Grisey[8], Michaël Lévinas[9], Hugues Dufourt[10], qui fondent en 1973 l’ensemble L’Itinéraire[11]. D’autres suivront le mouvement un temps : François Bousch, Kaija Saariaho, Marc-André Dalbavie, Magnus Lindberg, Philippe Hurel. http://musicollege.net/lycee/dalbavie_musique_spectrale.pdf (2 figures) La musique Spectrale Introduction : L'électronique procède à une sorte de microanalyse du phénomène sonore, qui lui découvre de nouvelles structures d'ordre et un champ de possibilités insoupçonnées. Les techniques de représentation optique du son - du spectrographe à l'ordinateur - permettent d'intervenir avec précision sur les détails de l'onde acoustique et de lui imprimer les plus légères modifications autrement que par le principe abandonné de la caisse de résonance. Pour schématiser, on peut dire que les compositeurs de musique spectrale sont les musiciens du son et non de la note. Considérant le son comme un univers, ils préfèrent travailler « dans le son » plutôt qu'« avec des sons » et ne se limitent pas à considérer le timbre comme l'une des dimensions majeures, voire déterminantes, du sonore, mais essaient au contraire de s'inspirer de la structure du spectre pour le choix des hauteurs Les courants de l’espace (1979) de Tristan Murail est ainsi une œuvre créée pour ondes Martenot traitées par synthétiseur et petit orchestre. Giacinto Scelsi[1] , Horatiu Radulescu et György Ligeti. Dans les années 1970, quelques compositeurs ont contribué à développer ce mouvement en France, dont Roger Tessier[1], Tristan Murail[1], Gérard Grisey[1] , Michaël Lévinas[1], Hugues Dufourt[1], qui fondent en 1973 l’ensemble L’Itinéraire[1] . La mise en vibration d’un instrument de musique provoque en réalité une multitude de mouvements vibratoires simultanés qui se produisent à des fréquences et des amplitudes différentes. > Ses mouvements vibratoires ne vont pas être perçus de manière isolée ; au contraire, ils vont fusionner. Cependant, ceux dont l’amplitude est la plus forte vont être entendus plus distinctement et faire émerger une hauteur de note. Dans le cas des instruments à cordes et des vents, l’énergie se concentre surtout autour de la fréquence la plus basse (d’où la notion de note fondamentale). Le spectre peut être représenté graphiquement grâce au sonagramme qui permet de visualiser l’évolution des partiels et harmoniques d’un son au cours du temps. L'acousticien Émile Leipp(1913-1986), fondateur du Laboratoire d'acoustique musicale de l'Université de Jussieu et avec lequel travaillera notamment le compositeur Gérard Grisey, s'enthousiasmait ainsi à propos du sonagramme : "Ce document est une véritable partition musicale comportant exactement les renseignements que l’on trouve sur la partition classique, avec cette différence toutefois qu’il est possible de mesurer avec précision la fréquence et la durée de chaque note, ainsi que son évolution dynamique. Moyennant un certain apprentissage, on peut lire et siffler directement cette partition." Sur le sonagramme, la fréquence (en hertz) est inscrite sur l’axe vertical, et le temps (en seconde) sur l’axe horizontal. Chaque partiel est représenté par un trait horizontal et son intensité indiquée selon le degré de noirceur du trait : plus le trait est noir, plus l’intensité du partiel est forte. Voici par exemple le sonagramme de l'enregistrement d'un do grave (do2 = 130Hz) puis d'un sol grave (sol2 = 200Hz) joués à l'alto (violon alto). Dans l’exemple suivant, il s’agit toujours d’un do2 joué à l’alto mais dont certaines harmoniques ont été filtrées artificiellement. Le timbre naturel de l’alto est ainsi modifié par moments : ces altérations du timbre s’entendent (parfois après un petit temps d’adaptation) et sont visibles sur le sonagramme ci-dessous (il s’agit des "trous" dans le spectre). Marc-André Dalbavie et la musique spectrale : Au tout début des années 80, Marc-André Dalbavie rencontre les initiateurs de la musique spectrale qui font du timbre l'élément moteur de la composition. Concept simple, le timbre permet de différencier un son instrumental d'un autre. Cependant, le timbre recouvre une réalité acoustique très complexe sur laquelle se sont penchés les compositeurs "spectralistes" et notamment Tristan Murail(Le Havre, 1947), dont Dalbavie fut l'élève à l'Ircam en 1985 (en classe d'informatique musicale). "En 1981 [la musique de Gérard Grisey(Belfort, 1946 - Paris, 1988), Tristan Murail, Hugues Dufour(Lyon, 1943) et Michaël Levinas(Paris, 1949)] ajoutait au processus ligétien la dimension du timbre qui, certes, était déjà présente chez Messiaen, mais de façon plus intuitive qu'analytique. La musique spectrale, que Grisey et Murail avaient inventée, apportait la clef qui manquait pour "entrer" dans le son. […] En considérant le son suivant le spectre de ses fréquences, Grisey, a apporté le vocabulaire qui manquait." […] "Dans l'écriture classique ou romantique, le son [...] n'est pas au départ de l'œuvre. Celle-ci est construite à partir d'un thème soumis à des transformations, des variations, des développements. […] avec la conception spectrale, la musique est produite à partir du son lui-même et donc, d'un certain point de vue, du lieu même de la musique." Marc-André Dalbavie, Le son en tous sens, p. 20-21. La musique spectrale représente un élément capital dans l'univers sonore de Marc-André Dalbavie.

Deux courants sont alors nés en réaction à l'hyper complexité : aux USA un courant minimaliste a popularisé le retour à une nouvelle modalité courant, vous trouverez l'aperçu ici. En France la réaction a été différente soucieuse de restaurer la qualité acoustique avec des moyens plus accessibles. Il est communément admis que le courant spectral est né des "travaux" préliminaires d'Horatiu Radulescu, un compositeur roumain installé en France et qui y a fait école.

La série harmonique

Seuls les intruments harmoniques au sens fort produisent des sons périodiques, c'est-à-dire tels que les partiels d'un son quelconque émis possèdent des fréquences multiples de leur fréquence de base, fn = n f1 (n = 1, 2, 3, ...). Tel est le cas des instruments à cordes souples, violon, alto, etc et le piano avec une assez bonne approximation dans le registre médian.

  • Les partisans de la méthode harmonique ne voient pas pourquoi ils devraient se limiter aux seuls harmoniques de rangs 2 et 3 d'où ils ont effectivement tenté de prendre en considération les harmoniques de rangs plus élevés. Evidemment les difficultés que l'on rencontrait en tentant d'harmoniser les octaves avec les quintes et les tierces n'ont fait de croître. L'énoncé de la série harmonique proposé par la figure ci-dessous éclaire le problème. Pour fixer les idées on a posé que le fondamental (n = 1) coïncidait avec le do2 (65.4 Hz). Les trois harmoniques suivants (n = 2, 3, 4) posent peu de problèmes : on peut les assimiler aux notes suivantes, dans l'ordre, do3 (octave), sol3 (quinte octaviée) et do4 (octave double). Comme prévu seule la quinte est légèrement trop haute de 2 cents (à peine 0.01 ton). Les choses se gâtent à partir de l'harmonique suivant (n = 5) : il devient problématique de l'assimiler à la note mi4 (tierce majeure doublement octaviée) du fait qu'elle est située 14 cents trop bas et les désaccords se multiplient voire s'aggravent si l'on considère les harmoniques 7, 10, 11, 13, 14 et 15. Il n'est pas envisageable de résoudre cette accumulation de désaccords par un artifice de tempérament au niveau des instruments acoustiques. La solution préconisée par les tenants de l'école spectrale a été de mettre au point une chirurgie du son permettant de rectifier les fréquences des partiels tellement intenses qu'ils en devenaient gênants. C'est le but que s'est fixé les laboratoires du son dont l'IRCAM à Paris s'est fait le prototype.
La série harmonique
La série harmonique